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Actualité juridique

Convention SYNTEC : Sur les modalités d’aménagement du temps de travail prévus par la Convention SYNTEC

12 octobre 2023

La convention collective Syntec, afin de répondre au mieux aux demandes des diverses activités qu’elle recouvre, prévoit de nombreux aménagements du temps de travail, parmi lesquels les JRTT.

Il convient de présenter l’intégralité des modalités envisagées par cette Convention, avant d’analyser les options supplémentaires pouvant s’offrir aux entreprises concernées.

Qu’est-ce que les RTT ?

  • RTT = réduction du temps de travail
  • Pour en bénéficier, ils doivent être prévus par une convention ou un accord collectif.
  • Ils permettent de compenser le dépassement de la durée collective de travail sous forme de jours de repos.
  • Ainsi, les RTT sont attribuées pour les salariés dont le contrat de travail prévoit des heures au-delà de 35 heures.

Le dispositif, mis en place au début des années 2000, a ensuite été supprimé par la loi du 20 août 2008. Les RTT survivent donc de deux manières :

  • À travers des accords collectifs conclus avant 2008.
  • Dans des dispositifs de compensation pour le dépassement de la durée collective du travail mis en place après 2008 et toujours dénommés « RTT » ou « JRTT » dans le cadre de la Convention SYNTEC.

Quelles sont les modalités prévues dans la Convention SYNTEC ?

La Convention SYNTEC envisage trois modalités d’aménagement du temps de travail.

  • La modalité standard de la Convention Syntec

Cette modalité concerne les salariés ETAM et certains cadres. Elle correspond de manière classique à une durée de travail de 35 heures.

Dans le cadre de cette modalité, il est possible de remplacer tout ou partie du paiement des heures supplémentaires par un repos équivalent. Pour cela, il conviendra d’adopter un accord d’entreprise ou, en l’absence d’organisations syndicales, après consultation du CSE et accord des salariés concernés.

Cette modalité n’offre donc pas une marge de manœuvre considérable pour les entreprises concernées.

En clair, soit elles ont la possibilité de négocier un accord d’entreprise pour remplacer le paiement de toute ou partie des heures supplémentaires, soit elles ne le peuvent pas et la seule possibilité offerte à ces entreprises sera donc de placer ces salariés aux 35 heures et de payer l’ensemble des heures supplémentaires effectuées, ce qui ne correspond malheureusement pas à la réalité économique de nombre de petites entreprises soumises à la Convention Syntec.

  • La modalité de « réalisation de missions »

La modalité n°2 prévue par la Convention Syntec correspond à un forfait en heures sur la semaine avec un plafond annuel en jours.

Les salariés concernés ne peuvent être que des ingénieurs et cadres bénéficiant d’une rémunération annuelle au moins égale au plafond annuel de la Sécurité sociale, ce qui correspond en 2023 à la somme de 43.992 €uros.

Ces salariés sont moins autonomes que les cadres pouvant bénéficier d’une convention de forfait en jours, mais ils bénéficient de missions particulières les empêchant de suivre un horaire strictement défini.

Avec cette modalité, le salarié peut effectuer jusqu’à 38 heures 30 de travail par semaine, avec un plafond de 219 jours de travail par an.

Les 3h30 effectuées en dépassement ont vocation à être compensées par des demi-journées de sous-activité (récupération de ces journées sous forme de repos compensateur…).

Attention : pour pouvoir appliquer cette modalité, la rémunération des salariés concernés par cette modalité devra englober les variations d’horaires dans la limite de 10 %, sans pouvoir être inférieure, annuellement, à 115 % du salaire minimum conventionnel.

Autrement dit, les salariés placés sous cette modalité doivent bénéficier d’une rémunération annuelle correspondant à 115% du salaire minimum conventionnel, ou bénéficier a minima d’une rémunération annuelle au moins égale au plafond annuel de la Sécurité sociale.

Là encore, de telles modalités ne sont aucunement adaptées aux PME et aux TPE soumises à la Convention Syntec.

De telles entreprises ne peuvent se permettre de remplir les conditions financières imposées par la Convention de branche pour mettre en place cette modalité.

Ces entreprises n’ont pas nécessairement non plus la possibilité de déroger à cette modalité par l’adoption d’un aménagement du temps de travail mieux adapté par le biais d’un accord d’entreprise (infra).

En clair, ces entreprises sont donc condamnées à placer leurs salariés aux 35 heures et à régler les heures supplémentaires, ou à ne pas faire d’heures supplémentaires et à freiner leur productivité.

  • Le forfait jours

La modalité n°3 offerte aux entreprises par la Convention Syntec correspond au forfait jours.

Les salariés concernés ne peuvent travailler que 218 jours par an au maximum par année civile, journée de solidarité incluse, pour un salarié présent sur une année complète et ayant acquis la totalité de ses droits à congés payés, compte non tenu des congés d’ancienneté conventionnels (et de ceux éventuellement prévus par accord d’entreprise ou usage) et des congés exceptionnels pour événements familiaux prévus par la convention Syntec.

Attention : au sein de la convention Syntec, seuls les salariés classés 3.1 ne peuvent être placés en forfait jour.

Un avenant à la Convention a légèrement assoupli cette condition et permettra prochainement de placer en forfait jours les salariés ingénieurs et cadres classés en position 2.3.

Néanmoins, pour placer un salarié en forfait jour, il conviendra là encore d’accorder à ces derniers une rémunération correspondant à 120 % du salaire minimum conventionnel pour les salariés en position 3.1 et à 122 % du salaire minimum conventionnel pour les salariés en position 2.3.

Cela représente 3.905,22 €uros de salaire brut mensuel pour un salarié en position 2.3 et 4.292,40 €uros pour les salariés placés en position 3.1.

Pour rappel : le passage en forfait jours nécessite également le respect de multiples conditions légales et conventionnelles pour être valide et ne pas risquer la nullité de la convention de forfait.

Là encore, ce dispositif n’est pas adapté à la réalité de nombre d’entreprises soumises à la convention Syntec.

Comment déroger à la Convention Syntec ?

En réalité, il apparaît que ces modalités ne sont pas adaptées à la plupart des petites et moyennes entreprises soumises à la Convention SYNTEC.

En effet, elle suppose des conditions trop drastiques ne correspondant pas à la réalité économique de ces entreprises.

En clair, ces entreprises ne peuvent se permettre de respecter les modalités proposées par la Convention Syntec car elles ne peuvent se permettre de payer leurs salariés placés en forfait heures au minimum 43.992 €uros à l’année ou appliquer les diverses majorations prévues par la convention de branche dans ces différentes modalités.

Pour ces entreprises, il est donc nécessaire de déroger à la convention de branche.

Cette dérogation peut passer par l’adoption de divers accords d’entreprise:

L’adoption d’un accord d’entreprise d’aménagement du temps de travail

L’aménagement du temps de travail au sein des entreprises peut passer par des accords visant à mettre en place une organisation du temps de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année (voire à trois ans si une convention ou un accord collectif de branche l’autorise).

Ce type d’accord permet d’adapter le rythme de travail des salariés au fil de l’année, en fonction de l’activité de l’entreprise et ainsi d’éviter notamment les heures supplémentaires en période de haute activité.

En clair, une période de référence est fixée, avec une limite, au-dessus de laquelle des heures supplémentaires seront réglées aux salariés.

Par exemple, sur une année, la limite est fixée à 1607 heures : si à la fin de l’année un ou plusieurs salariés a dépassé cette limite, il devra être rémunéré pour les heures supplémentaires accomplies sur cette année.

Il est également possible de prévoir en outre une limite hebdomadaire, fixée par exemple à 39 heures au-delà de laquelle les heures de travail effectuées au cours d’une même semaine constituent en tout état de cause des heures supplémentaires dont la rémunération est payée avec le salaire du mois considéré.

Cet aménagement peut être mis en place par le biais d’un accord d’entreprise, ou par engagement unilatéral de l’employeur.

Dans les entreprises sans représentants du personnel, l’adoption de l’accord d’entreprise supposera d’organiser un référendum d’entreprise et sera soumis à l’approbation du projet à la majorité des 2/3 du personnel.

Attention : si vous décidez de mettre en place ce type d’accord par engagement unilatéral, cet accord ne pourra s’organiser qu’en périodes de travail, égale à 9 semaines dans les entreprises employant moins de 50 salariés et à quatre semaines pour les entreprises de 50 salariés et plus.

Un accord d’aménagement du temps de travail interne à l’entreprise peut donc apparaître comme une solution adaptée pour les petites et moyennes entreprises souhaitant déroger aux dispositions de la Convention Syntec et organiser leur propre mode de répartition du temps de travail.

Néanmoins, l’adoption d’un tel accord suppose soit la négociation avec les représentants du personnel, soit la mise en place d’un référendum d’entreprise dans les entreprises qui ne sont pas dotées de ces représentants. Dans ce cas, il faudra parvenir à obtenir l’approbation des 2/3 des salariés.

La mise en place d’un tel aménagement par un engagement unilatéral présente moins d’intérêt en raison de la courte durée pendant laquelle cet accord pourra être mis en place.

La mise en place d’un accord dérogatoire aux dispositions conventionnelles relatives au forfait jours

La Syntec prévoit des conditions très strictes pour mettre en place une convention de forfait jours avec les salariés d’une entreprise.

Là encore, ces conditions peuvent empêcher les plus petites entreprises de mettre en place ce type de convention pourtant parfois plus favorables aux salariés et plus adaptées aux entreprises.

Depuis le mois de septembre 2017, les accords d’entreprise bénéficient d’une réelle primauté sur les accords de branche en la matière.

Dès lors, il est parfaitement possible de conclure dans votre entreprise un accord élargissant l’ouverture des conventions de forfait.

Cet accord pourra vous permettre d’ouvrir l’accès aux conventions de forfait à des salariés qui ne sont pas placés en position 3.1 ou 2.3.

En revanche, il ne sera pas possible d’élargir cette possibilité aux salariés qui ne sont pas cadres ou ingénieurs, ces derniers ne disposant pas de l’autonomie suffisante leur permettant d’accéder à ce type de conventions. Cela constituerait un risque de nullité des conventions de forfait conclues sur la base d’un tel accord.

Il est également possible de prévoir des rémunérations moins importantes que celles prévues par la Convention Syntec.

En effet, seuls les minimums conventionnels, définis par des barèmes régulièrement révisés constituent un impératif auquel il est impossible de déroger, même par accord d’entreprise.

En revanche, les modalités mises en œuvre au sein de la Syntec, selon lesquelles un salarié en position 3.1 ne peut être placé sous convention de forfait en jours qu’à condition de bénéficier de 120 % du minimum conventionnel ne constituent pas une modalité impérative.

Il est parfaitement possible de déroger à cette modalité par un accord d’entreprise et de prévoir une contrepartie moindre ou différente.

Là encore, cela supposera d’adopter un accord d’entreprise, dans les modalités susvisées.

Pourquoi déroger aux dispositions de la Convention Syntec en matière d’aménagement du temps de travail ?

Il apparaît que les dispositions conventionnelles de la Syntec en matière d’aménagement du temps de travail ne sont pas adaptées à la réalité économique des petites et moyennes entreprises soumises à cette Convention.

Il est donc nécessaire pour ces entreprises d’utiliser la négociation d’entreprise pour déroger aux dispositions de la branche, dans les limites fixées par la loi.

Ces dérogations permettront à ces entreprises d’adapter l’aménagement du temps de travail en fonction de leurs besoins réels et donc d’accompagner leur croissance et leur productivité.

Attention : il n’est aucunement question de permettre à des entreprises de déroger à la branche dans leur unique intérêt, sans prendre en compte les intérêts des salariés.

Il est question de permettre à ces entreprises d’adapter la durée du travail à leurs nécessités, tout en prenant en compte les conditions de travail des salariés et en envisageant des contreparties en faveur de ces derniers qui seront tout simplement mieux adaptées à la réalité économique de ces entreprises.

La négociation d’entreprise permettrait ainsi à ces petites et moyennes entreprises de mettre en place un aménagement du temps de travail pleinement adapté, avec des contreparties pour leurs salariés également adaptées à leur santé économique.

En réalité, il apparaît important que la Convention SYNTEC se réforme en la matière.

D’abord, parce que la tentation de déroger aux règles qu’elle a mises en œuvre en la matière est grande pour ces entreprises qui trouvent ces dispositions totalement inadaptées et déconnectées de leur réalité.

Aussi, l’effectivité de la convention est moins importante, ce qui est un réel problème puisque l’objectif d’une telle convention est, à l’origine, de fédérer au sein d’une même branche et de réunir un maximum d’entreprises comprenant les mêmes conditions de travail, ce qui constitue un atout de sécurité juridique sans pareil pour les salariés.

Ensuite, parce que la plupart des petites et moyennes entreprises qui souhaiteraient déroger à ces dispositions qui empêchent leur développement économique ne peuvent en pratique pas négocier au sein de leurs entreprises.

En l’absence de représentants du personnel, il est en effet difficile de mettre en place un référendum d’entreprise et de négocier directement avec les salariés.

Non seulement un tel dispositif est particulièrement chronophage dans ces entreprises dans lesquelles la Direction est en général multi-tâche, mais en plus il est particulièrement délicat, en pratique, d’expliquer aux salariés les raisons de cette négociation, leur faire comprendre les avantages de celle-ci pour l’entreprise et les contreparties que chacune des parties doit accepter de négocier pour conclure cet accord.

En définitive, il est difficile de négocier avec des salariés qui ne sont pas habitués à cet exercice qui nécessite une réelle expérience, dont bénéficie généralement les représentants du personnel, car il faut être capable de prendre en compte les nécessités de cet accord pour l’entreprise et pas uniquement la modification de ses propres conditions de travail, ce qui peut être délicat pour des salariés qui refuseraient toute modification trop importante de leurs conditions de travail, même si cela s’avérait absolument nécessaire pour permettre à l’entreprise d’évoluer et même si les propositions faites à ces salariés apparaîtraient, de manière objective, parfaitement acceptables.

Il nous semble donc nécessaire que la Syntec réforme de manière importante cette partie de la convention, afin de la rendre mieux adaptée à la réalité de toutes les entreprises et à terme de renforcer l’effectivité de cette convention au niveau national, ce qui aurait pour avantage de permettre à toutes les entreprises de bénéficier du même socle en la matière, assurant également aux salariés une uniformité de leurs conditions de travail au sein de la branche.

En l’absence de toute réforme, il semble évident que nombre d’entreprises, parmi celles qui ne l’ont pas encore fait, viendront déroger à ces conditions drastiques par le biais de la négociation d’entreprise.

Naturellement, le Cabinet DESRUMAUX AVOCATS se tient à votre disposition pour vous informer sur les éventuelles évolutions de la Syntec dans ce domaine ou le cas échéant pour vous accompagner dans la négociation et l’adoption d’un accord d’entreprise.

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